par BEn » 03 08 2007 à 18:44
Oh! Un Lartigue!
Je suis complètement fan de ce train dont l'histoire est rocambolesque !
Conçu par Charles Lartigue, le frère de Henri, celui qui à conçu le système de signalisation pourtant son nom, Charles à travaillé comme ingénieur en Algérie (entre autres), où il a développé le système de voie monorail dont nous parlons pour les mines. Le système fonctionnait à l'huile de coude, ou à renfort de mulets.
Le système Lartigue a été breveté à l'INPI en 1882, avec comme ajout tout un système de traction mécanique, des véhicules attelables, une voie pourvue de guides latéraux... En somme, le monorail Lartigue tel que présenté dans ce sujet.
Deux prototypes ont alors été exécutés: un tracteur électrique et des bennes pour l'exploitation agricole exposé à Paris, et un petit chemin de fer pour passagers, exposé à Londres. Ce dernier sera remarqué pour une ligne dans une des colonies de la grande Angleterre de l'époque: l'Irlande. Plusieurs projets de lignes au Royaume-Uni et en Irlande furent étudiés pour utiliser un Lartigue, mais seul le Listowell & Balybunion fut réalisé.
Inaugurée en 1888, la ligne fut un lieu de démonstration du système. Les politiques du département français de la Loire, comme bien des leurs, vinrent ainsi voir ce que le système présenté comme révolutionnaire donnait... Eux furent convaincus, contrairement aux autres qui voyaient dans cet engin étrange tout sauf un train sérieux...
Ainsi donc furent lancées les études dans le département de la Loire, entre Roanne et Lyon, sur la ligne Panniassières/Feurs. Pourquoi un monorail, alors que personne n'y croyait? Tout simplement parce que le sénateur président du conseil général était ferru de trains, d'innovations et, tout simplement, un ami de Lartigue... Mais cet appui ne fut pas le levier facilitant la mise en place du projet, car de nombreuses oppositions de firent entendre. A grands renforts de rapports truqués, de promesses intenables et de décisions pressées, le monorail fut finalement adopté.
Après quelques années de magouilles, de paiements défectueux, de démissions, de fraudes et de revirements, le voyage officiel de réception du chantier fut fixé au 22 août 1895. Quelques essais furent réalisés auparavant, apportant leur lot d'incidents habituels pour la ligne. Le jour J, la commission fit l'aller-retour, sans autre désagrément que ceux causés par la ligne elle même: dévers insuffisants, manque de stabilité du train, les chevalets qui se déplacent au passage du train... Le procès verbal de l'inspection se solda par un refus d'autoriser l'exploitation: aucun des bâtiments n'était terminé, le téléphone n'était pas installé, une seule locomotive était livrée et la voie n'était même pas sécurisante. Bref, une ligne inutilisable.
De nouveaux essais et une nouvelle inspection eut lieu un an après, après que Lartigue ait cherché où il pouvait l'argent que le Département ne voulait plus lui fournir. Tout fut pire! Le convoi ne fit pas la totalité du parcours avec les membres de la commission, la machine montrant des signes de faiblesse au niveau de la production de vapeur, tandis que les membres de la dite comission montraient, eux, des signes d'impatience et de lassitude. C'est un train vide qui rentra au dépôt...
Après diverses manoeuvres politiques, Lartigue et le sénateur parvinrent à gagner du temps, évitant un ferraillage que tout le monde désirait. Ils furent assez habiles pour négocier un raccordement avec la gare PLM de Feurs, dont les travaux initiaux commencèrent! La commission d'inspection fit un nouveau voyage sur la ligne à nouveau modifiée, et autorisèrent la circulation, pour peu que le train, limité à deux caisses hors machine, de dépasse pas 15 tonnes. Autrement dit, une parodie d'exploitation, destinée à rassurer les actionnaires des différentes sociétés que Lartigue avait créées pour l'occasion...
Mais le concessionnaire de la ligne se manifesta, déclarant qu'il n'était mandaté que pour les travaux, et que l'exploitation ne lui incombait pas légalement. Il était toutefois prêt à l'assurer, si le département lui fournissait les fonds dont il le disposait pas pour acheter de quoi exploiter la ligne. Bien entendu, après 11 ans de tergiversations, la coupe était pleine. La compagnie du monorail fut mise en déchéance et il fut lancé un appel à la création d'un appel d'offre pour trouver une société voulant reprendre la concession de la ligne, avec le procédé de traction de son choix, monorail ou non. Lartigue tenta, par le biais d'une société écran de reprendre l'exploitation, mais cela fut refusé. Hormis cette proposition, nul ne se présenta et le matériel fut vendu à un ferrailleur...
En 1912, une concession fut établie pour un chemin de fer à voie métrique. Mais la guerre de 14 entrra définitivement tout espoir de voir une ligne de chemin de fer entre Feurs et Panniassières.
Lartigue, qui disposait de soutiens politiques en haut lieu, ne fut pas inquiété et continua de promouvoir son invention. Il l'améliora encore, trouvant de l'argent en Belgique. Un prototype de machine électrique fut ainsi essayé sans succès à Bruxelles, puis envoyé en Angleterre pour équiper un projet de ligne à grande vitesse entre Manchester et Liverpool.
Quant au Listowell & Ballybunion, c'est une reconstruction comme il a été signalé, car la ligne à fonctionné jusqu'en 1924 sans incidents. La guerre d'indépendance fut le coup de grâce de ce chemin de fer qui revit le jour en 1988, par l'assemblage de divers éléments sauvegardés par des particuliers. L'association de sauvegarde et de restauration fur créé dans les années 90 et l'exploitation touristique fut mise en route en 2003, après reconstruction de la locomotive avec des fonds publics et inauguration par la Présidente de la République d'Irlande.
La ligne, sauvegardée à Listowell, fait actuellement 500 mètres de long, pour un parcours, manoeuvres incluses de 40 minutes! La dernière fois que je suis allé en Irlande, je n'ai pas pu y aller, mais c'est planifié dans le prochain voyage!
Benoît,
étudiant fauché en active recherche de nouveaux concepts novateurs en matière d'occupation de l'espace à vocation québéquo-ferromodélistique.
SNP force jaune!