par steamgood » 03 02 2015 à 19:48
Tout savoir sur Paul FROT et les 020 Corpet Louvet surbaissées : Voici un extrait du bulletin du CFBS n°63 de mai 2007 avec l’autorisation de son rédacteur en chef.
« Paul FROT est né à Mantes le 28 octobre 1864. Installé à Meaux, il fut successivement « marqueur », chef de service et représentant (1882-1886), puis entrepreneur de 1886 à 1939. Il fut également vice-président du syndicat des entrepreneurs de TP, conseiller de la Banque de France, vice-président de la société de crédit immobilier de Meaux. Il obtint le grand prix de l’exposition internationale de Turin et le titre de premier terrassier de France en 1911. Joli pedigree !
Confronté à des problèmes pour pilonner les remblais lors de la construction du canal du Nord en 1912-1913, il collabora avec l’ingénieur LAFFLY de Boulogne à la conception de roues cannelées spéciales, modèle qui fut ensuite repris par l’administration …
Lorsque apparu la première guerre mondiale, Paul FROT eu l’idée de munir des rouleaux compresseurs LAFFLY de blindages et de les transformer en tanks pour attaquer les tranchées ennemies. Ses engins pouvaient franchir des pentes de 20% à 10 Km/h. Consommation : 30 litres d’essence par jour, équipement : deux mitrailleuses ou un petit canon. Il construisit ainsi un prototype à ses frais qui subit un premier essai le 15 janvier 1915 à Issy les Moulineaux, puis les essais officiels eurent lieu le 28 mars 1915 aux établissements ... Corpet et Louvet à La Courneuve, ateliers qui avaient participé à la modification de ces engins. L’état-major présent fut très convaincu par la démonstration, mais curieusement aucune décision ne suivra.
Persévérant, FROT continua néanmoins ses tentatives pour convaincre les autorités, et proposa de faire un essai réel sur le front. Il invita le ministre à venir à Meaux visionner le film des essais de La Courneuve, en vain. En avril 1916, ces compresseurs inutilisés furent vendus aux anglais qui reprirent, eux, l’idée à leur compte.
Durant l’entre deux guerres, les Ets FROT participèrent à de nombreux chantiers dont notamment, la construction du bassin Vauban à Strasbourg, du canal du Nord, de la digue de Saint Malo, le quadruplement des voies de Villeneuve à Sens, la démolition des fortifications de Dunkerque, etc…
Paul Frot se retirera ensuite aux Sables d’Olonnes où il décédera à l’age de 79 ans, le 1 mai 1943. Ses héritiers reprendront bien entendu le flambeau. Les Ets FROT deviendront ensuite la société PLISSON, du nom de son gendre.
Comme on peut le constater, la collaboration entre Paul FROT et la société Corpet Louvet est une vieille histoire. De 1880 à 1927, l’entrepreneur lui commandera 35 machines, trois 020 de 6 tonnes et deux 030 de 10,5 tonnes en 1880, puis des 030 de 16 et 17 tonnes de 1886 à 1906. En 1907, il reçoit deux autres 030 d’un modèle très répandu sur les réseaux secondaires, le type « 18 ».
De 1921 à 1927, FROT recevra 18 machines de type 020 surbaissées tarant 11,5, 12,5 ou 13,5 tonnes selon la période de construction. D’autres réseaux industriels utilisèrent ce type de machines, notamment celui de l’Energie Electrique du Littoral Méditerranéen, centrale thermique située à Lingostière (Alpes maritimes) embranché sur les CP, également les aciéries de Micheville, à Villerupt (Meurthe et Moselle), et visiblement les forges de Montluçon. FROT recevra également quatre machines de type 040 numérotées 20 à 24, d’un modèle très proche de celui utilisé sur certains secondaires tels que la régie des chemins de fer du Doubs où les Tramways d’Ille et Vilaine.
Le nombre de machines préservées provenant des Ets FROT est relativement important :
Quatre 020 : les Nos 11, 15 et 25 par le CFBS et propriétés de la FACS ; la 26 préservée par les héritiers de FROT est restée de longues années dans la cour de leur entrepôt à Chevilly Larue dans le Val de Marne et était visible depuis la RN 7. Elle a depuis été confiée au MTVS à Valmondois.
Des quatre 040, deux existent encore : celle du Vivarais, la 24, et celle des Voies Ferrées du Velay, la 22. Une autre 040, réquisitionnée par l’organisation TOTD atterrira sur les CP en avril 1944 et roulera jusqu’en 1947, date à laquelle elle fut réformée, son châssis et son train de roues servant à la construction du premier locotracteur des CP, le N°51. Une quatrième 040 aurait été expédiée aux charbonnages du Tonkin. Le poids de ces puissantes machines est de 24 tonnes à vide (30,5 en charge), mais les roues sont les mêmes que sur les 020 ! »
Il est formidable que 6 machines aient été conservées. La 020 n°15 qui a roulé de 1972 à 1988 sur le CFBS a été confiée récemment à l’association des chemins de fer des Côtes du Nord. Si elle est restaurée, il y aura donc 4 machines FROT en état !