Bonjour,
Quelques questions s'étant posées, semble-t-il, sur le tracé de la ligne St Porchaire - Taillebourg des Chemins de fer Economiques des Charentes je vous propose de parcourir cette ligne dont une partie a déjà été bien défrichée sur le fil voisin des "CF Economiques des Charentes - Les Gares Aujourd'hui". C'est vrai que, s'agissant d'un "tramway", son parcours est très souvent en accotement ce qui n'aide pas à son repérage.
Pour illustrer le plus complètement possible cette balade je reprendrai aussi quelques clichés d'autres contributeurs (dont Oie Galopant, qui avait déjà bien travaillé le sujet). Merci à eux. Les CPA sont issues des trésors d'un collectionneur sauf, bien sur, les habituelles Delcampe...
Et, de même que les plaisanteries les plus courtes sont les moins longues et que les choses les plus compliquées sont les moins simples, nous ferons un trajet Saintes - Taillebourg via Saint Porchaire en faisant fi, bien sur, de la ligne directe de l'Etat qui longe la Charente.
Extrait Michelin n° 71 - 1930 - (Merci à 3Dmétrique)
Pour se situer on peut ainsi suivre le tracé de Saintes à St Porchaire. Le tracé vers Taillebourg, exploité de 1904 à 1925, qui prenait naissance aux "Quatre Routes", a disparu depuis 5 ans et n'est déjà plus noté sur la carte . Nous verrons ça tout à l'heure.
Pour le moment nous quittons Saintes-Ville puis passons à Saintes-Bellevue, dont les photos figurent un peu plus haut dans ce fil, laissons la ligne vers Mortagne descendre vers le Sud et, après cette bifurcation, nous remontons vers le nord-ouest.
Sur ce cliché le tracé des EC apparait dans l'angle inférieur droit, en site propre, avant de rejoindre la route nationale 150 reliant Saintes à Royan. Le rond rouge repère la bifurcation de la route de Marennes et de l'ile d'Oléron, qui continue tout droit, la N 150 pour Royan partant vers le sud. Ce carrefour est maintenant un giratoire. Quelques centaines de mètres en accotement avant une nouvelle portion de site propre.
PVA IGN 1950. Sortie de Saintes. Prend la suite de la PVA mise en ligne par 3Dmétrique en page 3 de ce fil.
On ne repère plus rien du site propre dans les champs mais, à l'orée d'un bois, au pied d'une station hertzienne ("terrain militaire, défense de photographier"), on retrouve le tracé.
Vers Nieul les Saintes, à travers bois.
Après un ex-PN la ligne se poursuit dans les champs.
vers Nieul les Saintes.
La haie qui barre ce cliché n'est pas une haie...C'est le remblai gagné par la végétation qui permettait à la ligne de franchir cette petite dépression, à la sortie du bois précédent.
Nieul les Saintes est maintenant tout proche.
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Nous arrivons à Nieul les Saintes et le tracé fait une belle conversion à 90° vers le nord-est, le long du chemin de Grande Communication N° 27. Ca ne sera pas la dernière.
PVA IGN 1950 - Nieul les Saintes.
Où est donc la gare ? On ne doit pas être très loin...
Nieul les Saintes.
Une rapide enquête m'apprend qu'elle n'existe plus mais qu'elle se situait près de la laiterie. Mais bien sur ! Regardons les CPA de la laiterie !
J'ai pris la photo précédente sous la flèche blanche; la ligne arrive de Saintes, en virage, sur la flèche orange; ça serait logique que la gare soit au bout de la flèche jaune...
La laiterie de Nieul les Saintes. Cliché de la fin des années 50 certainement, la ligne, exploitée de 1904 à 1934, n'existe plus mais son tracé est encore visible.
Sur le cliché suivant, la laiterie, construite en 1910, est neuve, les pavillons qui l'encadrent n'ont encore qu'un seul étage. Les quatre bâtiments de gauche constituent la porcherie.
Nieul, la porcherie et la laiterie, vues de dos.
Approchons nous discrètement...
La gare de Nieul les Saintes et quelques couverts.
Voici donc la gare de Nieul, près de la laiterie, ce qui n'est pas rare dans la région car ces entreprises pouvaient ainsi facilement exporter leur production de beurre et de fromage vers les villes, centres de consommation.
Etant donné l'importance de l'industrie laitière régionale à l'époque, en terme d'activité et d'emplois, dont la proximité a aujourd'hui disparue en raison du développement des grands groupes internationaux et la disparition concomitante des petites laiteries, il me semble intéressant d'en dire deux mots car elles ont grandement alimenté le trafic des petits trains locaux.
Le développement de l'industrie laitière locale est étroitement lié à l'apparition du phylloxéra qui ravage le vignoble charentais après son apparition en 1871 près d'Archiac et de Saintes (le vignoble passe de 280 000 ha en 1877 à 42 000 ha en 1895, 75 000 aujourd'hui).
Devant le recul de la vigne les agriculteurs se tournent vers l'élevage laitier aidés par le savoir faire des nombreux vendéens qui s'installent dans la région. Ils s'organisent en coopérative sous l'influence, à partir de 1888, d'Eugène Biraud qui crée la première laiterie coopérative à St Georges du Bois (17). Le nombre des laiteries coopératives explose à partir de 1880, bien plus dans la région que dans le reste de la France. Environ 200 se crééront jusqu'en 1950 en Charente-Inférieure et Deux-Sèvres.
Les CPA montrant des laiteries installées à proximité des chemins de fer locaux ne sont pas rare. Et, en retour, il est vraisemblable qu'au tournant des années 1900 les coopérateurs poussèrent à la construction de ces mêmes lignes.
A suivre...