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DZ - Algérie - des restes de voies etroites

MessagePosté: 05 04 2013 à 14:39
par Ferrovius
Bonjour
- Avec un ami anglais nous voulions échapper à l'hiver européen. Comme le Bolan Pass ou le Chappar Rift au Pakistan ne sont plus trop possibles vu l'environnement hostile, mais qu'on souhaitait quelque chose d'un peu hors des sentiers (ou rails) battus, on a préparé un voyage en train en Algérie. Notre rapport de voyage est là pour ceux qui lisent l'anglais:
http://www.drehscheibe-foren.de/foren/r ... 30,6356225, avec des infos sur la littérature et autres documentation sur le chemins de fer en Algérie. Je crois que la revue de la FACS avait aussi publié quelque chose et si quelqu'un peut m'indiquer le numéro concerné, je serais reconnaissant.
- Il ne reste plus que de la voie normale en service, mais il y a aussi des restes des lignes et installations à voie métrique à l'est et au centre ainsi qu'à voie de 1.05 à l'Ouest.
Voilà ce que nous avons vu, respectivement quelques commentaires sur les lignes VE en partant de l'EST; voyager en train ne permet pas des observations détaillés dans les gares intermédiares et de manière génrale, on est encore pas trop habitué aux étrangers qui trainent dans les installations...
1) EST (Constantine): En grande banlieue de Constantine, la gare d'El Kroub possède encore une remise d'un style typique de VM française, au départ de l'ancienne ligne sur Tebessa (qui avait un temps des 050 ex Côte d'Or). La nouvelles ligne à VN sur Tebessa passe ailleurs puis rejoint le tracé ancien (voir les cartes sur le rapport).
La longue ligne Biskra-Touggourt avait été mise à VN just'avant le début de la guerre d'indépendence. Les autres lignes VM de la région ont été fermées avant 1955, car elle n'apparaissent pas sur la carte Michelin de 1956 que nous avions.
2) CENTRE: aucune trace repérée des lignes de grande banlieu d'Alger. A Blida d'où partait la longue et difficile ligne vers Medea puis dans le désert jusqu'à Djelfa, on voit encore les voies à quai sur le côté gauche en allant vers Oran ainsi que l'imposant dépôt atelier. Y a-t'il du matériel VM à l'intérieur? La ligne aurait été mise à VN jusqu'à Médea (mais alors sans trafic voyageur) puis "in situ" mais inexploitée en VM jusqu'à Djelfa, en attente de mise à VN.
3) OUEST: à l'Ouest du tunnel de l'Atlas, on passe à la voie de 1.05 m. La gare de Relizane possède encore une gare CFD typique et l'atelier/dépôt qui va avec. Une carcasse de diesel entrevue ressemble à un des modèles français livrés avant l'indépendance (voir sur le bouquin de la Régiordane). A Mohammedia (Perregaux), aucune trace à l'endroit où le MN (Méditerranée-Niger) croisait la ligne impériale Casa/Oran-Alger-Tunis. A Oran la situation est complexe. La gare du MN semble avoir été à l'origine coincée entre le cimetière européen et le passage sur voie à l'entrée de la gare VN, puis ensuite transférée près de la gare VN. Nous expliquons cela dans le rapport. Aucune trace des tramways qui allaient vers Mers el Kebir et Ain el Turk, mais en ville les nouveaux trams roulent en essai. A remarquer qu'au contraire d'Alger, ce tram va bien irriguer le centre ville, même dans des rues assez étroites. Plus à l'Ouest vers la frontière marocaine, Béni Saf avait un réseau minier à voie de 80 cms et une ligne à voie de 1.05 montant vers Tlemcen. Il y a des restes le long de la route, mais surtout ce magnifique ensemble en gare de Tlemcen:
Dépot atelier VE Tlemcen photo PL.JPG
Dépot atelier VE Tlemcen photo PL.JPG (186.87 Kio) Vu 1895 fois

Donc beaucoup de découvertes à faire dans ce pays pour un intrépide et aventureux chasseur de reliques ferroviaires. Mais Il faudra disposer d'une voiture ou 4x4, d'un autochtone pour s'y retrouver et expliquer ce qu'on fait là (un étranger est instantanément repéré). Avis aux amateurs et on attend vos commentaires et photos!

Re: DZ - Algérie - des restes de voies etroites

MessagePosté: 05 04 2013 à 16:12
par rms olympic
La FACS avait en effet consacré un numéro sur les "Chemins de fer à Voie Métrique d'Algérie" en 2001.
Il s'agit du N°286 (2001/4); cette revue, appelé encore à cette époque : "Chemins de fer Régionaux & Urbains", avait consacré plus de 20 pages avec plans et pas mal de photos de cette époque, mais en noirs et blancs.

Re: DZ - Algérie - des restes de voies etroites

MessagePosté: 05 04 2013 à 18:05
par Ferrovius
Bonsoir
Une correction (les infos vont vite en 2013...)
- M. Pascal Béjui de la Régiordagne, qui a produit avec deux autres auteurs les deux magnifiques livres sur les CFs coloniaux français, me dit que l'appelation Méditerranée-Niger ne s'applique pas à la ligne de 1.05 m qui allait de Oran à Colomb-Béchar par Mohammedia (Perregaux) et Ain Sefra, qui faisait partie des chemins de fer de l'Etat ensuite intégré au CFA.
- Le nom de MN s'appplique seulement à la voie normale qui part de Ghazaouet (Nemours) sur la gare frontière de Zoud-el-Beghal près de Meghnia (Marnia) pour entrer ensuite au Maroc sur Oujda puis sur Bou-Afra et Colomb-Béchar, ville quasiment à cheval sur la frontière actuellement fermée. Je comprend que cette ligne est "dormante" entre Oujda et Bou Afra (quelques trains de service et de tourisme par année) et certainement fermée mais apparememnt encore en place entre Bou Afra et la frontière.
- On se demande quel trafic ou espoir de trafic a justifié la construction de deux lignes plus ou moins parrallèles dans ces vastes étendues peu fertiles? La Ligne Etat avait semble-t'il un trafic de charbon depuis la mine de Kenadsa près de Colomb-Béchar, mais autrement?

Re: DZ - Algérie - des restes de voies etroites

MessagePosté: 08 04 2013 à 19:31
par Ferrovius
Bonsoir
Suite de mon échange avec P. Bejui au sujet de ces deux voies quasi parallèles dans un quasi désert et sur de très longues distances sur cet axe "Méditerranée-Niger"!
QUOTE
Tout s’explique par les changements survenus au cours des plus de 60 ans qui séparent l’ouverture du premier tronçon de la voie métrique (1879) de l’arrivée de la voie normale à Colomb-Béchar (1941).

Voie de 1,055
Concession en 1874 de la ligne Arzew – Saïda (169 km) à la Cie Franco-Algérienne. Concession assortie du “privilège d’exploitation” de 300 000 ha d’alfa, ce qui confirme la vocation essentiellement agricole de ce chemin de fer. Ouverture en 1879. En 1881, “soulèvement indigène” plus au sud : l’armée entreprend immédiatement de prolonger la ligne en direction de Méchéria, pour favoriser la “pacification”.
Ensuite, défaillance de la Cie Franco-Algérienne et reprise de l’exploitation en régie par ce que l’usage appellera le Réseau oranais de l’Etat (1)
C’est donc l’Etat qui va, au nord, reporter l’origine de la ligne à Oran (1900) puis la prolonger au sud jusqu’à Béchar (1906). La première raison d’être de ce prolongement consiste à fixer la frontière avec le Maroc, au tracé jusque là très imprécis. Rappel : le Maroc est encore indépendant et le protectorat français n’y sera établi qu’en 1912. Colomb-Béchar elle-même n’est qu’un poste de garde perdu en plein désert : la voie métrique ne prendra une certaine importance économique qu’après la 1ère guerre, avec le prolongement de Béchar aux mines de Kénadza (1921).

Voie de 1,435
Le rêve transsaharien est né avec la IIIe République dans les années 1870, mais la première autorisation d’engagement de travaux n’a été accordée qu’en 1939, avec pour premier objectif Kenadza. Deux explications pour le “doublonnement” :

•la voie métrique est considérée depuis longtemps comme insuffisante face au développement industriel (pourtant très relatif) du bassin de Béchar,
•pour la traversée saharienne, toutes les missions dépêchées depuis les années 1880 ont recommandé l’itinéraire via Béchar : au sud de ce point, c’est le plus facile tant sur le plan du relief que sur celui de la géologie (presque pas de zone de sable à traverser pour atteindre la boucle du Niger) (2).


Il est donc arrêté dès les premiers projets qu’on aura un “Méditerranée – Niger” à voie normale : choix passablement idéologique, tendance “grandeur nationale”, vu ce qu’on savait faire dès le tournant du siècle avec la voie métrique, d’une part, et s’agissant de se raccorder aux lignes d’Afrique subsaharienne toutes à voie métrique d’autre part (3).

Après avoir débuté de bric et de broc au nord en 1941, la voie finira par s’arrêter au milieu de nulle part, à 90 km au sud de Béchar, pour vivoter avec des trafics majoritairement miniers. Tout se termine en 1962 avec l’indépendance algérienne : désengagement des Français (dissolution de l’organisme du Méditerranée – Niger), problème du double franchissement de la frontière de deux Etats désormais indépendants... et pas franchement copains.


(1) : Ce n’était effectivement pas une raison sociale, mais la dénomination sans existence juridique d’une régie directe. Cas non isolé, voir l’appellation “Chemins de Fer de la Corse” apparue après-guerre, et qui n’est devenue une “vraie” société qu’en 2012.
(2) : Il en a été de même pour l’automobile, dès la fameuse Croisière noire d’André Citroën : les autochenilles sont parties de Béchar, où elles étaient arrivées sur les wagons de la voie métrique.
(3) : Pour donner une idée de l’ambition : terminus ouest de Niamey (Niger) au PK 2480 de Béchar, terminus est de Ségou (actuel Mali) au PK 2885.
UNQUOTE
En effet ce trafic d'alfa semble expliquer l'impressionante densité de VEs dans l'arrière pays d'Oran durant ces années.

Re: DZ - Algérie - des restes de voies etroites

MessagePosté: 09 04 2013 à 22:02
par YVES
Reportage intéressant.
je sais que dans la collection Pérève existaient des photos des CFA prises en 1958.
#B6 #B6 #B6