Allez, direction le Bois !
Parce qu'avec toutes ces manœuvres en gare et sur les quais, on a rajouté du retard à celui déjà pris à la Flotte, pour les mêmes raisons.
Nous repartons donc par le même chemin, repassons sous la porte Toiras, traversons les fortifications et rejoignons l'aiguille dite "de rebroussement".
Comme Géoportail ne remonte pas dans le temps à cet endroit à cause de la présence de la citadelle, je me replie sur ma carte de 1942. Mais cette fois, elle n'est pas assez précise et le paysage a bien changé.
C'est là qu'intervient ma passion pour l'archéologie : la vue aérienne actuelle montre des traces de végétation différente, tant sur Googgle que chez le français :
Vous voyez cette trace d'une autre couleur dans l'herbe ? Et bien c'est le "talus" de la voie !
Mais pourquoi est-ce aussi net ? Deux raisons :
* la première est que la photo a du être prise en fin d'été, et la sécheresse sur une terre plus compactée a roussi l'herbe. Mais quand même, à ce point, depuis le temps...
* la deuxième explication est qu'avant la construction du giratoire, ce talus supportait la route, aujourd'hui détournée, menant à la plage de la Cible.
Qu'en est-il sur le terrain ? J'y suis allé mercredi dernier, sans grand espoir puisqu'il pleut depuis décembre. La sécheresse, actuellement, tu repasseras...
Pourtant, regardez bien ce cliché : vous ne distinguez pas un changement très net de végétation ?
Oui, il faut avoir l’œil exercé, et là, ce n'est pas qu'on voit ce qu'on veut bien voir, c'est réel ! la preuve, on voit tous la même chose
Ensuite, la voie suivait une petite route, qui a fait place à l'actuelle déviation. L'élargissement s'est fait au détriment du talus, qui a été absorbé.
Pour le tronçon qui suit, on bénéficie de la vue récente. Même période de prise de vue, mêmes conséquences, on peut faire de l'archéologie aérienne, en "lisant" la trace de la voie :
Ce qui donne le tracé approximatif suivant :
L'objectif étant de me renseigner sur les vestiges encore visibles, direction le terrain.
Premier arrêt photo au changement de direction, à l'emplacement où la voie plongeait vers le sud en quittant le bord de la route, et après l'avoir traversée à niveau.
Non seulement le talus est toujours là, mais on y lit même le dévers :
Ce ouiquinde, j'y retourne avec la pelle -c'est mieux qu'avec les pattes de devant, foi de lapin !- et je creuse pour trouver le St Graal : un tire-fond !
Puis la voie suivait le bord du chemin, actuelle piste cyclable/chemin d'exploitation rural (circulation réglementée, surtout l'été...). Là encore, le chemin étant devenu une petite route, le talus a été absorbé. D'autant que cette route a été bordée d'une petite dépression servant de drainage :
Je dois dire qu'à cet endroit où voie et chemin se séparent, l'archéo aérienne précédemment évoquée m'a permis de retrouver le remblai de la vf dans un petit chemin de traverse, repéré ici en gris :
Pourquoi y a-t-il moins d'herbe à l'emplacement du talus ? Non pas parce que les engins agricoles ont du mal et patinent pour franchir l'épaisseur du talus -ça risque pas
!- mais parce que l'herbe y pousse moins bien à cause du tassement supérieur au terrain naturel environnant. Et donc elle résiste moins bien au passage des engins. CQFD
.
Ensuite, impossible de retrouver des traces jusqu'au Morinand : le remembrement, la vigne qui couvre de nouveau une grande partie de l'île, la terre un peu "amoureuse" et un horaire professionnel chargé ont fait que je n'ai pas approfondi la chose.
Le soir, j'ai reconstitué le tracé sur la vue aérienne ancienne (1948, un an après la disparition du train) et l'ai reporté sur la vue moderne : voilà le résultat :
Le Morinand, ancien village indépendant rattaché à la commune du Bois comme celui du Roulant, possédait un moulin à vent appartenant à un meunier nommé Bellère. C'est ainsi que le moulin du Morinand, ou moulin de Bellère, est devenu "moulin de Bel-Air" ! Et s'il possède ses ailes à voiles, la tour est vide de tout mécanisme. Après l'ouragan de décembre 1999 -l'anémomètre du phare des Baleines s'est envolé après avoir mesuré 207 km/h, on le cherche encore-, ailes et arbre étaient couchés sur la petite place devant le moulin.
Je possède une carte postale prise d'hélicoptère par la société Lapie dont s'était la spécialité, et qui a déposé le bilan en 1965. Cette vue est donc antérieure. Achetée pour une bouchée de pain sorti de la bouche encore humide, elle ne présente pas forcément un grand intérêt,... sauf qu'on y voit très nettement la trace du remblai de la voie ferrée :
Je ne sais pas s'il y avait un arrêt au moulin du Morinand. Je crois qu'il a été prévu mais non réalisé : à l'époque, les gens n'hésitaient pas à marcher, la gare de St Martin n'était pas très loin, 2 km tout au plus. Et puis vu le retard qu'avait pris le convoi, on avait le temps...
La prochaine fois, encore un peu d'archéologie aérienne, et nous nous arrêterons au Bois-Plage en Ré, dit "le Bois" pour les intimes.
Et comme Tyrphon attend celle-là depuis le début de cet épisode, je préciserai qu'un archéologue est une personne qui met dans des caisses le produit de ses fouilles
. Il faut dire que les gens sont généralement curieux.
Des fouilles...
Ouala ouala
...et hop